Le 14 octobre 2018 auront lieu, en Belgique, les élections communales (municipales). Pour Lavenir.net, titre de PQR en Belgique francophone, c’est un enjeu fondamental. L’info locale est au cœur de notre métier. Depuis un an, un travail transversal est d’ailleurs mené, impliquant les rédactions (agences) locales, la rédaction nationale ainsi que le web à travers le projet « Destination Communes » et depuis la fin août, les différentes séries « enjeux par commune » ont été lancées par les rédactions locales.

Du côté du weblab, nous venons de lancer (le vendredi 14 septembre, pour être précis) un newsgame ou serious game. L’idée ? Permettre aux internautes de se mettre dans la peau d’un bourgmestre (maire) et tenter de se faire réélire.

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Cela fait longtemps que l’idée d’un newsgame me trottait dans la tête. En toute honnêteté, mes connaissances dans le domaine sont limitées mais deux productions m’ont particulièrement marqué : Recontruire Haïti (de Jean Abbiateci & Florent Maurin) et « Le Bon, la Brute et le Comptable » (de Journalism++, avec Nicolas Kayser-Bril). J’avais aussi eu l’occasion de suivre une journée de formation avec Florent Maurin, organisée par l’AJPRO à Bruxelles.

Pour convaincre mes responsables de se lancer dans le projet, j’ai mis en avant deux de nos forces :

  • Notre connaissance du terrain, ce que nous permet de monter un scénario crédible
  • Travailler avec Thomas Bernard, un collègue, journaliste de la team du weblab, qui a réalisé le premier newsgame de Lavenir.net dans le cadre de l’Euro 2016 (malheureusement plus en ligne) et qui a suivi aussi une formation (plus poussée) avec Florent Maurin.

Le feu vert rapidement donné, il fallait prendre en compte plusieurs choses :

  • Le newsgame doit être « mobile friendly »
  • Il faut intéresser les gens, sans les ennuyer ou tomber dans des aspects trop techniques
  • Il faut éviter de tomber dans le manichéisme
  • La présentation doit être soignée
  • Les délais doivent être tenus (la date des élections communales ne pouvant être déplacée ^^)

L’équipe pour produire ce newsgame était composée de 4 personnes :

  • Thomas Bernard : conception, scénarisation, réalisation (calcul des points…)
  • Cédric Dussart : développement web
  • Sébastien Cattalini : design, graphisme
  • Moi-même : conception, scénarisation

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    Cédric et Thomas lors du sprint final.

Je reviens sur les principales difficultés :

  • Le jeu a d’abord été conçu pour être jouable sur mobile : cela a impliqué des choix de design et de présentation. En travaillant de cette façon dès le début, on évite le crash quand il faut faire rentrer une version desktop en format mobile.
  • Avoir un scénario qui parle au plus grand nombre : je me suis basé sur une bonne partie de mon expérience en locale ainsi que sur le suivi des informations locales lorsque j’ai intégré le pôle région de lavenir.net (lire aussi : Faire de l’info locale la force d’un site de presse : premier bilan en 4 points). Ce jeu se base sur des faits réels. C’est à nos yeux sa grande force. Nous avons d’ailleurs tenu à ajouter des capsules informatives qui permettent aux internautes d’accéder aux archives à partir desquelles nous avons basé le scénario).
    Les dossiers présentés mais aussi le choix (et donc les points attribués) sont basés sur notre expérience d’observateurs de la politique communale longue d’une dizaine d’années. Bien sûr, il y a une part d’interprétation, dans le nombre de points attribués, mais les retours d’élus nous montrent que nous sommes dans le bon.
  • Pour éviter de tomber dans la caricature « bonne réponse / mauvaise réponse » : les réactions des joueurs influencent 3 jauges (budget, popularité, pression politique).Dans la peau d'un bourgmestre
  • Le côté explicatif/pédagogique est aussi mis en avant grâce à Pierre, l’assistant virtuel.
  • Dès le début, nous avons intégré l’équipe de graphistes au projet. Elle a été impliquée dans toute la genèse et la création, ce qui nous a permis d’élaborer rapidement et facilement un univers graphique.
  • Délais : on s’était donné un peu de marge et finalement, le jeu est sorti un mois plus tard que prévu. Mais la mise en ligne à un mois des élections communales me paraît être finalement un bon timing.

Retour  de mon collège Thomas Bernard (l’architecte du jeu): « par rapport au newsgame mis en ligne lors de l’Euro 2016 on a fait ici un bond de géant dans tous les domaines. L’expérience de 2016 a pas mal servi et on a réutilisé plusieurs modules développés à l’époque. »

Combien de temps cela nous a-t-il pris ? Le projet a été lancé en mai mais à chaque fois, il s’agissait que de quelques heures: réunion de briefing, conception du scénario… La partie la plus importante, et qui a mobilisé la plupart de l’équipe, a été la création et les interactions. Un gros travail de Thomas et de Cédric. Je pense qu’au total le projet a pris 6 jours. Ce qui, étalé sur plusieurs mois et au vu d’autres productions, est raisonnable.

La principale remarque à l’heure d’écrire ces lignes est que le jeu accorde trop d’importance à la popularité. En gros « on ne fait pas de la politique pour se faire réélire ». Pourtant la réponse est claire : oui, les gens se présentent sur une liste électorale pour se faire élire et une fois qu’ils sont élus, la grande partie d’entre-eux souhaitent rempiler. Et pour se faire (ré)élire, il faut être populaire, selon notre système démocratique.

Après un mois de fonctionnement, qu’avons-nous appris ? (Mise à jour 6/11/2018 )

Qu’avons-nous appris en regardant les chiffres après un peu plus d’un mois de mise en ligne ?

  • D’abord une donnée qui nous a très agréablement surpris: 6400 parties ont été complétées à 100%. C’est considérable vu le temps que demande le jeu.
  • Plus de 57% des joueurs ont réussi à se faire réélire. Ce qui signifie que nous avons bien ajusté le niveau suite aux nombreux tests réalisés avant le lancement (mais parfois, les tests, on s’est loupé comme je l’ai écrit dans ce post « Non, on n’aurait pas dû oublier de faire le test de grand-mère« )
  • 48% des joueurs ont choisi de jouer à Ruman, la ville qui proposait le niveau de difficulté le plus faible.

Pour plus d’infos concernant l’exploitation de ces données, n’hésitez pas à lire « Dans la peau d’un bourgmestre: vous avez été intransigeant et prêt à faire des sacrifices« .

Nous avons aussi fait tester le jeu à des ados:

Bourgmestre vidéo ado

Bourgmestre vidéo ado 2

Envie de vous faire votre idée ? Testez notre jeu (c’est gratuit) :

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Quelques retours :

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